lundi, novembre 17, 2003

Dérèglements #1

Dehors, il fait beau. Quelle immense tristesse t’envahit en ce mois de novembre. Comment les générations futures comprendront-elle le subtil jeu des saisons qui a marqué l’histoire matérielle et symbolique de l’homme ? Dans cent ans, les conséquences des activités humaines sur le climat auront atteint une telle ampleur que les conditions de la vie sur Terre ne nous sont même pas imaginables. Comment comprendront-ils alors ces pages nourries de réflexions atmosphériques, cette poésie des nuées sera-t-elle obsolète ? Grave question. Les feuilles mortes se ramassent à la pelle. A l’appel des siècles futurs, ta plume se précipite. Ton cœur se remplit de dégoût pour cette ville couchée à tes pieds. Tu n’as pas la vocation de charcutier de certains. Tu souhaites plus fuir cette sordide vulgarité qu’en apprêter les tranches pour l’appétit des bourgeois. Pourtant tu écris, et la nostalgie des lieux crapuleux que t’interdit la misère de tes ressources, te soulève encore un peu plus le cœur. Le baromètre est déréglé. Tu n’est décidément capable d’aucune activité suivie. Le destin se noit dans le bruit de fonds des tressautements de ton cœur.

Pourtant tu avais une route toute tracée. Porté, poussé par les espérances, tout petit déjà tu régissais le monde. Tes lectures, tes jeux les plus innocents en apparence te préparaient à la modeler par ton activité réfléchie et résolue, la vie du monde, la marche du monde. Il y a un malentendu fondamental. J’ai lu dans un livre obscur, Péril Blanc de René Bureau.... décrire la scène des playmobiles, à rebours, dans un village africain. L'ethnologue s’en félicitait, voyant dans le refus de laisser les prétentions des enfants dépasser celle des adultes la vraie sagesse.

JMD